La préparation
« La préparation s’est très bien passée pour nous. Nous étions au centre d’entrainement du RC Lens à La Gaillette pendant trois semaines d’entrainements intensives où nous rentrions uniquement les week-ends pour retrouver nos familles. Le groupe avant le début de la compétition était prêt à réaliser de grandes choses, avec la volonté de prendre les matchs les uns après les autres sans brûler les étapes. L’objectif premier était de sortir des poules. »
La compétition
« Le match de la Chine est pour nous le plus important de la compétition. Il faut absolument une victoire sur ce match là pour pouvoir espérer passer les poules. Cette équipe termine la coupe du monde vice-champion en 2023. On aborde donc le match en sachant que cela sera très dur. La victoire passera par un bloc défensif très performant et de réussir à bien jouer les situations de contre qu’on aura. On défend très bien sur l’ensemble du match et je fais le boulot dans les buts avec 7/8 arrêts importants. On réussit à marquer sur une récupération au milieu du terrain de notre attaquant Khalifa Youme qui enchaine double contact, petit pont et plat du pied petit filet ! Victoire 1-0.
Le deuxième match contre le Brésil est plus difficile. Je suis sur le banc pour ce match. Le plan de jeu était sensiblement le même : miser sur un bon socle défensif en étant légèrement plus haut sur le terrain, pour pouvoir couper plus haut les joueurs brésiliens qui sont excellents lorsqu’ils sont lancés en conduite de balles. On craque sur des détails en fin de première mi-temps, avec un premier but sur corner et un second sur une double pénalité. A 2-0 à la mi temps, on est un peu déçu parce qu’on a quelques situations et on encaisse les buts sur des phases arrêtés. On revient en deuxième mi-temps avec l’envie de remonter le score mais on encaisse un troisième but à 4 minutes de la fin du match. Défaite 3-0.
Troisième match de poule contre la Turquie. On sait avant le match que le Brésil et la Chine ont fait match nul 0-0 ce qui donne le classement suivant avant le match Brésil 1er avec 7 points – Chine 2ème avec 4 points – France 3ème avec 3 points – Turquie 4ème avec 0 points. La victoire est obligatoire pour se qualifier en demi-finale, comme nous avons une moins bonne différence de but que la Chine. On ouvre le score au bout de 5 minutes de jeu par notre capitaine Frederic Villeroux, sur une percée depuis notre zone défensive et on alourdi le score en deuxième mi-temps grâce à Martin Baron sur un corner magnifique où il dribble deux joueurs avant de loger la frappe dans la lucarne. C’est un match totalement maîtrisé qu’on aurai pu remporter avec un plus grand écart, on touche trois fois les montants et sans jamais subir d’occasions nettes sur le plan défensif. Victoire 2-0. »
La phase finale
« On passe en demi contre le premier de l’autre poule, la Colombie. De leurs côtés, ils ont fait deux victoires et un nul sans prendre de buts et en ayant deux véritables tueurs en attaque. C’est un match très accroché avec un engagement de la part des deux équipes très élevé ! Mon homologue colombien et moi-même nous sommes pas mal illustrés dans ce match avec trois/quatre arrêts décisifs chacun. Nos adversaires finissent par craquer à 4 minutes de la fin sur un corner qu’ils n’arrivent pas à dégager proprement, Frederic récupère le ballon à l’entrée de la surface et fusille sous la barre. On réussi a gérer la fin de match tant bien que mal au courage avec toujours un pied, une cuisse ou mes gants pour garder ce score de 1-0 ! On est en finale ! Et contre l’Argentine, qui a réussi l’exploit de sortir le Brésil aux tirs aux buts. Le Brésil avait toujours remporté la médaille d’or depuis que le cécifoot est aux Jeux. Cette fois-ci, ils n’atteindront pas la finale. On y voit des signes dans le groupe. Pour nous l’objectif premier, qui était de ramener une médaille à la maison, est atteint mais on ne veut pas s’arrêter là et comme le coach nous l’a répété durant cette semaine de compète, il fallait finir le boulot entamé à Londres avec la médaille d’argent et cette fois-ci ramener l’OR ! Le début de match est très tendu, aucune des deux équipes ne se livre totalement dans le match. On ouvre le score à la 11ème minute sur une récupération de notre inarrêtable capitaine à la suite d’un corner argentin. Il remonte tout le terrain en solo et termine par une frappe pied gauche qui passe sous le bras du gardien argentin. C’est la folie dans le stade et dans nos têtes, mais cela va vite redescendre parce qu’on prend l’égalisation directement sur l’engagement argentin avec une louche qui termine à l’entrée de ma surface et l’attaquant argentin qui donne tout ce qu’il a et marque en force entre mes jambes. Tout est à refaire. La deuxième mi temps est aussi fermée que la première, on subi nettement plus qu’en première et j’ai deux arrêts importants qui nous laissent dans le match à 1-1. La décision se fera aux penaltys. »
La séance de tirs aux buts en finale
« Sur le plan personnel, je ne vais pas dire que j’étais satisfait que ça se termine aux penaltys. Bien sûr que j’aurais tout autant aimé si on avait gagné avant le coup de sifflet final. Mais pour que l’histoire soit encore plus belle, il fallait qu’on souffre jusqu’au bout. Les joueurs avec qui j’ai joué dans le coin savent à quel point j’adore cet exercice des tirs au buts. Le rêve de chaque petit footeux quand il commence le foot c’est d’être le dernier tireur en finale de coupe du monde et que le stade exulte après avoir marqué. Le mien, cela a toujours été d’être le gardien qui stoppe le penalty et qui aide son équipe à gagner. J’ai pu réaliser ce rêve au pied de la tour Eiffel, aux Jeux, chez nous avec nos proches et devant 12 000 personnes, en stoppant le troisième tireur argentin ! A ce moment-là c’est la folie mais je dois rester focus dans le cas ou notre troisième tireur manquerai sa frappe. Je vois avancer notre capitaine vers le but pour le dernier penalty. Pour la petite histoire, Frederic Villeroux déteste tirer les penaltys ou les doubles pénalités. Il a un des taux de réussite le plus bas de l’équipe sur ces deux exercices mais bizarrement à cet instant pour moi on a gagné, avant même qu’il tire. Il pose le ballon, fait ses deux pas d’élans et fracasse le petit filet avec une frappe millimétrée !
C’est juste indescriptible ce qu’on vit à ce moment la, je n’arrive pas encore aujourd’hui à réaliser ! On exulte de joie, tout le monde est en larmes autour de nous, les gens dans le stade crient de bonheur. On est Champion Paralympique ! Personne n’avait mis une pièce sur nous avant la compétition, on pense à tous les sacrifices qu’on a tous fait pour en arriver là et c’est un sentiment merveilleux quand le travail porte ses fruits ! »
Ses souvenirs
« Je pense que les souvenirs que je garderais seront nombreux mais si je devais en garder un seul c’est celui du silence puis bruit du stade au moment du dernier penalty en finale. Jamais je n’avais ressenti ça en termes d’émotion. Nous étions comme tous connectés, joueurs, staff, public. Nous ne faisions qu’un et ce brouhaha général au moment du but restera ancré dans ma tête pour toujours. Je tiens à remercier tous les gens qui auront été impliqués dans cette réussite sportive et humaine. On ne réalise pas ce genre d’exploit seul, et je pense notamment à mes deux clubs le FC Cecifoot Précy sur Oise et le FC Talence, aux staffs, aux bénévoles qui ont toujours été merveilleux avec moi durant la préparation d’un évènement aussi grand que des Jeux à la maison. Petite mention spéciale à David mon entraineur des gardiens au FC Talence avec qui on a fourni un travail monstrueux les trois dernières années au quotidien, souvent juste lui et moi, qu’il pleuve qu’il vente qu’il neige on était sur le terrain. Sans lui je n’aurai sûrement pas été aussi performant lors de cette compétition. Et enfin un énorme merci à mes proches qui m’ont toujours soutenu dans cette aventure. Les entrainements, les matchs, les déplacements, les stages, l’alimentation, la récupération, le peu de vacances sont autant de choses qu’ils n’ont pas choisi mais subi avec notre préparation et ramener la plus belle des médailles permet de les remercier de la plus belle des manières ! On va pouvoir profiter à fond maintenant que le travail est terminé ! »