Matthieu Chalmé, ce samedi, avec la réserve de Bordeaux, vous vous déplacez à Libourne. Un match particulier pour vous car vous avez joué à Libourne-Saint-Seurin par le passé ?
Oui. A l’époque, après une formation aux Girondins de Bordeaux. Je n’avais pas signé professionnel. En septembre 2001, j’avais été contacté par Libourne, afin de venir voir le club mais aussi mon état physique. Au bout de deux jours, Jean-Marc Furlan m’a dit qu’il souhaitait me garder pour finir la saison avec Libourne-Saint-Seurin. J’avais accepté, estimant que c’était un club qui pouvait me faire grandir et rebondir.
Pourquoi aviez-vous choisi ce club à cette époque ?
J’avais des contacts avec d’autres clubs comme Niort. Mais je n’étais pas prêt à quitter la région. J’avais découvert un groupe de joueurs extra, avec une bonne mentalité. Il y avait une osmose sur et en dehors du terrain. Il y avait un super président, des gens accueillants. J’ai vraiment vécu une année exceptionnelle.
Quels souvenirs gardez-vous de ces sept mois ?
Je retiens ce parcours de coupe de France magnifique. C’étaient de vraies émotions fortes. J’étais dans une équipe qui jouait au football, j’avais trouvé un club ambitieux. Nous avions loupé la montée de pas grand chose, mais nous avions fait un énorme parcours en Coupe de France. On avait éliminé Lille, Metz, Châteauroux avant de perdre en quarts de finale contre Bastia au terme des prolongations. J’ai vraiment pris beaucoup de plaisir dans ce club. Tout restera à jamais gravé dans ma mémoire. Libourne-Saint-Seurin m’a beaucoup donné !
C’est d’ailleurs grâce au parcours de Coupe de France que vous avez été repéré par Lille ?
Bizarrement, j’avais à cœur de prouver que j’avais le niveau de jouer au-dessus. J’avais eu à cette époque des contacts avec Toulouse (L2), Nantes (L1), Bordeaux (L1) et Lille (L1). Il y avait un choix à faire et cela a été Lille. C’était le projet qui me correspondait le plus. Et j’avais besoin de sortir du cocon bordelais. Je suis donc parti avec ma femme à 900 kilomètres et cela a été un choix payant même s’il avait été difficile à prendre.
J’y suis resté cinq ans entre 2002 et 2007. J’ai vécu de grands moments crescendo. Au départ, quand j’ai signé, le deal était d’avoir deux ans pour m’adapter. Et si j’y parvenais, je deviendrai titulaire. Cela a été le cas plus vite que prévu. J’ai beaucoup progressé. Et j’ai vécu des moments extraordinaires : la ligue des champions, la victoire à Manchester United en coupe UEFA, le huitième de finale de ligue des champions, des grands moments en championnat de Ligue 1. Et puis, la rencontre de Claude Puel qui m’a appris le métier. Peu de joueurs arrivent à rebondir après avoir été recalé d’un centre de formation. J’ai beaucoup travaillé, je me suis beaucoup investi. Et j’y suis arrivé !
Après ces cinq années, vous avez choisi de revenir à Bordeaux. La boucle était bouclée ?
Non, je n’avais pas fait de plan de carrière établi. J’avais eu le choix entre trois à quatre clubs. Laurent Blanc m’avait contacté. Le feeling est de suite passé, le projet me plaisait. Bordeaux est mon club de cœur. Je sentais que c’était le bon moment de de retrouver la famille et les amis. Mais je savais que ce ne serait pas évident de venir jouer dans sa région, sa ville. Tout s’est très bien passé pendant quatre / cinq ans. Il y a eu le titre de champion de France, le trophée des champions, un quart de finale de ligue des champions… Le plus dur pour moi a été sur la fin. Je ne suis pas parvenu à retrouver mon niveau. J’étais peut-être un peu usé mentalement et physiquement. J’ai demandé à être prêté à Ajaccio pour rejouer en Ligue 1. Je n’avais aucune rancœur. Il fallait être réaliste sur mes capacités, je n’avais plus le niveau. J’étais moins bien. J’ai toujours été un joueur dur au mal et quelques blessures m’ont freiné. Je l’ai peut-être payé. Mais, c’était déjà exceptionnel de vivre tout ça !
En 2014, votre carrière professionnelle s’est donc arrêtée ?
Oui, le club a voulu tourner la page. En juin 2014, j’ai été sollicité pour un projet intéressant. Mais mes enfants, qui avaient grandi ne voulaient plus bouger. Et dans ma tête c’était clair : si je n’avais pas quelque chose ici, j’arrêtais ma carrière professionnelle. Alors, je m’entretenais en m’entrainant avec la réserve. J’ai très bien vécu l’arrêt de ma carrière professionnelle. Il y a bien entendu des choses qui me manquent mais d’autres qui ne me manquent pas du tout. Je ne retiendrai que le positif.
En janvier 2015, vous avez accepté de jouer à Lège Cap Ferret ?
Oui, je connaissais très bien Nicolas Sahnoun que j’avais connu au centre de formation des Girondins de Bordeaux. Quand j’ai annoncé à mes enfants que je reprenais le football, ils n’étaient pas trop d’accord car ils s’étaient habitués à ce que je sois bien plus disponible durant six mois. Ils étaient contents car cela n’a pas été le cas durant ma carrière. Mais finalement, j’ai accepté le projet. J’ai rendu service à un club amateur de la région. J’ai ainsi pu rendre au football amateur ce qu’il m’avait donné. Cela a été un choix payant car j’ai passé six mois de plaisir. Nous n’étions pas loin de la montée en CFA et nous avons gagné la coupe d’Aquitaine. J’ai rencontré de supers personnes. Ce club m’a rappelé ce que j’avais vécu à Libourne. J’ai toujours marché au feeling. Lège Cap Ferret avait souhaité que je signe un an de plus. Mais j’ai décliné car j’avais un doute sur mes capacités à pouvoir jouer toute la saison. Je ne me sentais pas aller au bout. Alors, j’ai passé mes diplômes pour être entraîneur. Pourtant, joueur je me suis toujours dit que je n’étais pas fait pour ça. Mais, au fil des années, beaucoup de personnes m’ont dit que j’étais fait pour ça. Il fallait que j’y réfléchisse et que je découvre ce métier. Je suis finalement passé de l’autre côté. J’ai beaucoup appris sur les formations, avec des entraîneurs amateurs. J’ai vécu de belles années et de belles rencontres. Tout cela s’est concrétisé lorsqu’Ulrich Ramé et moi avions eu en charge l’équipe après Willy Sagnol.
Après cette expérience, Bordeaux voulait me conserver mais j’ai été déçu qu’il n’y ait pas de places malgré le service rendu. J’ai attendu la fin de saison suivante, en juin 2017, où ils m’ont proposé la place d’adjoint de Philippe Lucas, auprès de la réserve, en National 3. Poste que j’ai accepté avec plaisir.
Comment se passe cette expérience auprès de la réserve ?
Très bien. Avoir cette opportunité était parfaite. Je connaissais le cadre. C’était l’option idéale car je suis encadré par des gens qui ont beaucoup d’expériences : Philippe Lucas, Patrick Battiston, Jean-Luc Dogon, Pierre Espanol, André Penelva… Je continue d’apprendre le métier qui me plait beaucoup. Travailler auprès de la formation est intéressant et je connais bien car je suis passé par là. Je sais que les décisions qu’on prendra en fin de saison seront difficiles. Je l’ai vécu. Alors je vais essayer de leur faire mieux vivre. Ces échecs font partie de leur formation. Mais si j’ai réussi après un tel échec, ils pourront y arriver aussi. Car au final, est-ce que partir de Bordeaux ne m’a pas fait plus évoluer ? Je n’aurai peut-être pas eu cette carrière en restant ici. J’étais abattu sur le coup, c’est certain. Mais les formateurs avaient sûrement raison. A ce moment-là de ma carrière ; je n’étais peut-être pas prêt. Il n’y a que les faibles qui ont des excuses.
C’est la première fois que vous allez revenir à Moueix depuis votre départ. Ce sera un moment particulier ?
Oui ! Je n’ai que des bons souvenirs. Mais quinze ans après, les choses ont évolué. Cela m’avait mal à cœur lorsque Libourne était relégué par le passé. J’ai toujours suivi les résultats du club. Je vois toujours Simon Adoue, avec qui j’avais passé le BEF. Cela va me faire un réel plaisir de le recroiser. Il était si jeune lorsqu’on jouait ensemble, cela ne nous rajeunit pas ! Ce club comptera toujours pour moi et c’est une joie de revenir. Cela risque de me rappeler beaucoup de choses.
Comment abordez-vous cette rencontre contre Libourne ?
Avec ambition même si ce match est en même temps qu’un tour de Gambardella. Le club a des objectifs dans cette compétition. Le groupe sera très jeune. On sait que Libourne voudra gagner. A l’aller, nous l’avions emporté mais cela avait été difficile. Je le prends comme un bon match, dans un club et une ville que je connais bien. Chacun aura besoin de points pour des objectifs différents mais ce sera un bon match.
Parcours joueur : Bordeaux, Libourne-Saint-Seurin, Lille, Bordeaux, Ajaccio, Bordeaux, Lège Cap Ferret.
Parcours entraîneur : Bordeaux, Bordeaux B.